Chronique du 10 décembre 2021 : Adoption par le Sénat de la proposition de loi interdisant les pratiques visant à réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre
A écouter sur Radio Espérance ICI
Chers amis auditeurs bonjour, et bienvenue dans votre chronique Et le droit dans tout ça, présentée aujourd’hui par Aude Mirkovic.
Au début du mois d’octobre, je vous ai parlé dans cette chronique d’une proposition de loi adoptée à l’époque par l’Assemblée nationale interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne.
Cette même proposition vient d’être voté par le Sénat, mardi 7 décembre.
Ce texte est annoncé pour sanctionner les « thérapies de conversion », c’est-à-dire notamment des « stages de guérison, hypnose, traitements par électrochocs, prescription d’anxiolytiques, injection d’hormones, ou encore mariages forcés, séquestration … » (Laurence Vanceunebrock, rapporteure).
Voilà ce qui est annoncé mais la réalité est différente car ce texte incrimine des actes qui n’ont pas grand-chose à voir avec tout cela comme notamment les « propos répétés visant à modifier l’identité de genre ».
Que quoi s’agit-il ?
L’identité de genre renvoie au ressenti profond et subjectif de la personne, qui peut se sentir homme, femme, aucun des deux, tantôt l’un, tantôt l’autre.
Pendant l’enfance et l’adolescence, les questionnements liés à l’identité et au genre font partie des multiples questionnements qui sont le propre de ces âges.
Certains jeunes se sentent mal dans leur corps de fille ou de garçon au point qu’ils pensent, disent-ils, être nés dans le mauvais corps et ils demandent à être identifié dans le genre qu’ils revendiquent, masculin ou féminin, qui ne correspond pas à leur sexe.
Il y a deux façons d’accompagner ces jeunes :
- L’approche affirmative, les affirmer dans le genre qu’ils revendiquent. Cela prend la forme d’une transition sociale, désigner le jeune avec le prénom qu’il choisit et en tant que garçon ou fille comme il le demande. Cela inclut parfois une transition médicale, l’administration de bloqueurs de puberté puis d’hormones du sexe revendiqué, et parfois même de la chirurgie, l’ablation des seins étant pratiquée en France sur des filles mineures.
- L’approche psychothérapeutique, qui consiste à prendre le mal-être du jeune très au sérieux mais pour en explorer les causes, et chercher à y remédier et aider le jeune à se réconcilier avec son corps et au minimum à vivre avec lui.
Le texte voté au Parlement compromet cet accompagnement non affirmatif des jeunes : qui osera en effet s’investir auprès de ces jeunes si les paroles prononcées, si les conseils donnés peuvent ensuite être considérés comme visant à modifier ou réprimer leur identité de genre ?
Par exemple, les parents d’une fille de 15 ans pourront-ils encore s’opposer à la demande de celle-ci de se faire retirer les seins ?
Le Sénat a apporté une petite précision : l’infraction, le délit qui enverrait en prison, n’est pas constituée lorsque les propos ont seulement pour objet d’inviter à la prudence et à la réflexion.
Il est donc nécessaire d’écrire dans la loi que des parents, des psychologues n’iront pas en prison s’ils invitent un jeune à la prudence et à la réflexion alors que ce jeune envisage un parcours médical invasif, aux conséquences pour certaines irréversibles. Ce n’est pas pour nous rassurer.
Le texte sera examiné en commission mixte paritaire la semaine prochaine.
Nous pouvons écrire aux membres de la commission pour leur demander, les supplier même, de maintenir au minimum, cet ajout de bon sens du Sénat, sous peine d’abandonner les jeunes en souffrance liée à leur genre qui ont, au contraire, grand besoin d’aide.
Retrouver si vous le souhaitez les noms et les mails des membres de cette commission, ainsi que cette chronique, sur le site juristespourlenfance.com
Composition de la Commission mixte paritaire (CMP)