La prostitution des mineurs : les nouvelles réalités

Chronique du 24 mars 2025, à écouter sur radio Espérance ICI [https://player.radio-esperance.fr/?radio=antenne-principale&media=audio&option=reecouter&date=1742799635&id=757340]

Bonjour, chers amis auditeurs, voici la chronique des Juristes pour l’enfance « Et le droit dans tout ça ? » présentée aujourd’hui par Matthieu le Tourneur.

Alors que les travaux de la commission d’enquête sur les manquements des politiques publiques de protection de l’enfance vont se terminer, il nous semble nécessaire de revenir sur un point très important concernant des difficultés que rencontrent les enfants issus de l’aide sociale à l’enfance. En 2022, le Dr Aziz Essadek démontrait que 15000 mineurs de l’ASE étaient en situation de prostitution. Plus largement, la prostitution des mineurs est un phénomène en extension et en mutation.

Alors, première question, qui sont les mineurs qui se livrent à la prostitution ?

Bien qu’il y ait des cas de mineurs de 11, 12, 13 ans, la grande majorité des mineurs ont entre 14 et 17 ans.

Il y a entre 7000 et 10000 mineurs en situation de prostitution selon les autorités, et les associations estiment qu’il en existe entre 15000 et 20000. Soit 3,5 enfants par lycée en France.

Bien souvent les mineurs en situation de prostitution sont déjà victimes de violences sexuelles, harcèlement, inceste, etc. Manque d’estime d’eux-mêmes. Elles peuvent être issues de tous les milieux sociaux, des cités de banlieues, des beaux quartiers et du fin fond de la campagne.

Deuxième question : qui sont les proxénètes ?

La plupart sont des garçons de cités connus pour des petits délits. Il y a un continuum entre trafic de drogue et prostitution des mineurs. Leur méthode est de les recruter par une histoire d’amour, puis la drogue, le porno, l’argent facile, le viol transforme ces jeunes filles en prostituées.

Il faut noter que, s’il y a encore des proxénètes, c’est principalement des arrangements entre gamins plutôt que de la contrainte pure et dure. En effet, dans de très nombreux cas, les jeunes filles prostituées n’ont pas de proxénètes.

Troisième question : que dit la loi ?

La loi pénalise les clients avec des peines allant de 5 ans à 20 ans de réclusion en fonction de l’âge de la victime et des circonstances, et les proxénètes avec des peines allant entre 10 ans et 20 de réclusion en fonction de l’âge de la victime (+ ou – 15 ans)

Quatrième question : que fait la police ?

La police judiciaire ne travaille que sur le proxénétisme, puisque la situation de prostitution n’est pas réprimée. Et le problème est que le proxénétisme n’est plus un élément essentiel de la prostitution des mineurs, puisque tout est très facile à organiser sur internet.

La traque des clients est très compliquée par l’anonymat d’internet et par le fait qu’il faut prouver que les clients savaient que la prostituée était mineure.

La PJ ne peut pas travailler sur les prostitués, très très peu sur les clients, et seulement sur les proxénètes, mais il n’y en a très peu.

Cinquième question : que fait la société ?

Premièrement, tous les professionnels disent qu’il y a un problème central : l’accès des jeunes au porno

Deuxièmement : la société s’interdit tout discours sur la sexualité auprès des jeunes. Tout est vu au travers du prisme du consentement. Si c’est le seul prisme, alors quel est le problème avec la prostitution ? Mon corps mon choix.

Solution :

Il faut tenir un discours sur la sexualité. Cette éducation doit passer par la biologie, l’anatomie, la différence et la complémentarité des sexes, la physiologie… Il ne faut pas oublier aussi les questions relatives aux mécanismes de la procréation. Il faut surtout que l’on ose rappeler les interdits (l’inceste, les attitudes entre un majeur et un mineur, l’exposition des mineurs à la pornographie…), grands absents du programme d’éducation à la sexualité. Et c’est pourquoi nous exerçons un recours contre ce programme, car le combat est global et que la protection des enfants se joue aussi et surtout dans l’éducation.

 

À la semaine prochaine.

Et le droit dans tout ça ?

Une chronique de Juristes pour l’enfance présentée chaque lundi sur Radio Espérance, par Olivia Sarton, Matthieu le Tourneur et Aude Mirkovic, à 8h, 12h45 et 19h20 (durée 3 minutes)

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