Et le droit dans tout ça ? Une chronique présentée chaque semaine par Juristes pour l’enfance sur Radio Espérance
Présentée par Aude Mirkovic et Olivia Sarton, le vendredi à 7h50, 12h40 et 19h05 ainsi que le samedi à 8h20 (durée 3 minutes)
Chronique du 21 avril 2023: • Palais de Tokyo – L’art comme prétexte à la pédo-pornographie, par Aude Mirkovic
Chronique du 14 avril • Protection de l’enfance contre la pédopornographie par Olivia Sarton
Revenons une nouvelle fois sur l’affaire du Palais de Tokyo et de l’exposition de la toile pédopornographique « Fuck Abstraction ! » de l’artiste suisse Miriam Cahn.
Il y a quelques semaines, des associations avaient saisi la justice pour demander que ce tableau soit retiré de l’exposition au Palais de Tokyo d’une série d’œuvres de cette artiste, dès lors que la présentation au public de scènes de pédocriminalité tombe sous le coup de la loi puisque la diffusion de ce genre d’images met en danger les mineurs.
Le Conseil d’État ayant rejeté leur requête le 14 avril dernier par une décision inexplicable que nous avons déjà évoquée , les associations ne baissent pas les bras et 17 associations de défense de l’enfance contre la pédocriminalité ont adressé cette semaine au Palais de Tokyo une lettre ouverte pour demander aux administrateurs et aux dirigeants de prendre leurs responsabilités.
En effet, l’œuvre « Fuck Abstraction ! » de Miriam Cahn relève bel et bien de la pédopornographie, définie par la Directive européenne du 13 décembre 2011 comme englobant « tout matériel représentant de manière visuelle une personne qui paraît être un enfant se livrant à un comportement sexuellement explicite, réel ou simulé ».
Donc la pédopornographie est bel et bien définie par la loi et cette définition englobe ce tableau.
La liberté artistique, la liberté de création est une réalité, est une valeur, mais ce n’est n’est pas la seule en cause. Elle doit être confrontée à d’autres valeurs, parmi lesquelles la valeur supérieure de la protection de l’enfance.
Et les associations posent au Palais de Tokyo les questions suivantes :
-est-ce qu’il suffira aux personnes qui détiennent des images pédopornographiques sur leur ordinateur de faire figurer un avertissement dénonçant le crime représenté pour justifier la détention de ces images ?
– est-ce qu’une prochaine exposition pourrait comporter des photos de viols d’enfant, au motif qu’elles s’inscrivent dans une démarche artistique pour dénoncer les horreurs de la guerre ?
Ces simples questions montrent bien qu’il est nécessaire et légitime de poser des limites à l’exposition publique de la création, même artistique.
Si l’art doit pouvoir « montrer le réel dans ce qu’il a de monstrueux », il n’en reste pas moins qu’un sujet comme celui des violences sexuelles sur mineurs ne peut faire l’objet d’une naïve complaisance.
Et, en dépit des justifications de l’auteur quant à son intention et en dépit de la médiation organisée par le musée autour de ce tableau particulièrement brutal, son exposition publique met les enfants en danger.
Le Palais de Tokyo entendra-t-il cet appel des associations de défense de l’enfance ? Et bien, nous l’espérons, mais en tout état de cause, les associations ne pouvaient pas s’en tenir à cette décision de justice absolument incompréhensible et nous tenons à envoyer le message aux enfants que nous ne baisserons pas les bras pour réclamer leur protection.
Je rappelle qu’il y a encore ne serait-ce que 5 ans, des juges osaient retenir le pseudo-consentement d’une fillette de 11 ans ou de 13 ans à un acte sexuel avec un adulte. Nous revenons de loin en matière de pédocriminalité et la société doit être beaucoup plus exigeante pour protéger les enfants.
Alors vous aussi, vous pouvez vous aussi, si vous le souhaitez, réagir. Vous pouvez écrire au Palais de Tokyo 13 avenue du Président Wilson 75116 Paris.
A l’audience, le Palais de Tokyo s’est vanté du fait que – soit disant – personne n’aurait protesté. Alors donnez-lui tort, protestez, bien sûr il appartient à chacun d’agir en conscience, mais ce qui est certain c’est que la protection de l’enfance est plus que jamais l’affaire de tous.