Une chronique présentée chaque semaine par Juristes pour l’enfance sur Radio Espérance
Présentée par Aude Mirkovic et Olivia Sarton, le vendredi à 7h50, 12h40 et 19h05 ainsi que le samedi à 8h20 (durée 3 minutes)
Chronique du 24 décembre 2021 : Non à la GPA !
A écouter sur Radio Espérance ICI
Chers amis auditeurs bonjour, bienvenue dans votre chronique et le droit dans tout ça présentée aujourd’hui par Aude Mirkovic.
En ce temps de Noël, je vais vous parler d’une naissance, même si cette naissance est un petit peu triste puisqu’il s’agit des enfants nés sans vie, des enfants mort-nés, qui sont l’objet d’une loi du 6 décembre 2021[1].
Cette loi pourtant n’est pas triste, puisqu’elle modifie le code civil pour permettre de donner à ces enfants un nom de famille.
Habituellement, lorsque la naissance d’un enfant est déclarée à l’état civil, on dresse un acte de naissance.
Si l’enfant est mort-né, l’officier de l’état civil établit un acte d’enfant sans vie.
Cet acte est inscrit sur le registre d’état civil de décès.
Il était déjà possible de donner à l’enfant des prénoms, et de porter l’acte d’enfant sans vie dans la rubrique « décès » du livret de famille.
L’innovation de la loi du 6 décembre est dans la possibilité de donner à cet enfant un nom de famille.
En revanche, le texte précise qu’il ne confère pas à l’enfant la personnalité juridique.
Mais cela ne signifie en rien que l’enfant n’est pas reconnu, comme en témoigne ce texte qui permet désormais de lui donner un nom.
L’absence de personnalité juridique signifie seulement que l’enfant n’a jamais eu de capacité juridique, capacité de passer des contrats par exemple, de filiation au sens juridique du terme, qui l’inclurait dans les calculs successoraux. Mais ces aspects ne vont guère lui faire défaut car à quoi pourrait bien lui servir la capacité juridique, à ce petit ange ? Seule sa brève existence de petit être humain importe ici.
Justement, se pose la question de savoir à partir de quelle durée de grossesse l’acte d’enfant sans vie peut être demandé.
Il faut produire un certificat médical d’accouchement et une circulaire de 2009 précise que ce certificat médical d’accouchement implique « le recueil d’un corps formé […] et sexué, quand bien même le processus de maturation demeure inachevé ». Cela exclut les enfants ayant fait l’objet d’une interruption volontaire de grossesse ou d’une fausse couche avant la quinzième semaine d’aménorrhée, plus ou moins 12-13 semaines de grossesse. La circulaire précise néanmoins que « la réalité d’un accouchement relève de l’appréciation des praticiens », ce qui laisse une marge d’appréciation au médecin.
Les parents d’un enfant décédé plus jeune, en tout début de grossesse, pourraient donc obtenir un certificat d’accouchement, s’ils le voulaient, mais cela ne sera sans doute pas courant car la perte d’un enfant en tout début de grossesse relève de l’intimité et n’est en général pas portée dans la sphère sociale.
Cette loi actualise certes le paradoxe de prévoir légalement l’interruption de la grossesse pour des enfants qui peuvent par ailleurs recevoir par ailleurs un prénom et maintenant un nom de famille. En effet, l’interruption dite médicale de grossesse peut concerner des enfants à tous les stades de la grossesse.
Pour autant, ce texte ne concerne pas l’interruption de grossesse. C’est une bonne loi, qui permet d’inscrire officiellement dans la famille un enfant qui a vécu seulement in utero. Et il est bon que la loi, en des temps de déni généralisé du réel, prenne ainsi acte de la réalité de l’existence, même trop brève, d’un petit enfant.
[1]LOI n° 2021-1576 du 6 décembre 2021 visant à nommer les enfants nés sans vie