FIGAROVOX/TRIBUNE – Le projet de loi bioéthique prévoit le remboursement à 100% de la PMA pour les couples de femmes et les femmes célibataires. Neuf associations de défense des malades craignent que ce choix ne se fasse au préjudice de la prise en charge de maladies rares.
Article original sur https://www.lefigaro.fr/vox/societe/l-assurance-maladie-devrait-reserver-ses-ressources-a-la-prise-en-charge-des-maladies-20191014
Cette tribune est signée par neuf associations de défense des droits des malades: Association Connaître les Syndromes Cérébelleux, Association de patients ayant une Dyskinésie Ciliaire Primitive, Association des Pancréatites Chroniques Héréditaires, Association française contre l’algie vasculaire de la face, Association française des malades de la Thyroïde, Association K20 Maladies de l’empreinte du Chromosome 20, MOSAÏQUES Association des «X» fragiles, Association française des fibromyalgiques, Association Debra France.
Nous, associations de défense des droits des malades, souhaitons exprimer notre préoccupation au sujet des arbitrages actuellement faits en ce qui concerne le remboursement de l’aide médicale à la procréation (AMP).
Le maintien de la prise en charge à 100 % de l’AMP implique un arbitrage en défaveur d’autres pathologies graves de patients.
Le projet de loi bioéthique, en cours d’examen devant le Parlement, prévoit de maintenir la prise en charge à 100 % par l’assurance maladie des actes d’AMP, à savoir les actes eux-mêmes et les médicaments prescrits, y compris des produits pris en charge habituellement à seulement 15 ou 30 %, alors que dans le même temps il entend supprimer le critère pathologique d’infertilité médicalement constatée pour donner accès à l’AMP.
Notre propos n’est en rien de commenter le choix politique de l’extension de l’AMP, cela n’est pas de notre ressort. Mais nous nous étonnons que, tout en élargissant l’accès à l’AMP en supprimant la condition d’infertilité, le projet de loi maintienne la prise en charge à 100 %.
L’Assurance maladie a estimé en 2014 que le coût de la prise en charge de l’AMP s’élevait alors à 288 millions d’euros. Aujourd’hui, ce coût est en constante progression en raison de la hausse des demandes.
Le maintien de la prise en charge à 100 % de l’AMP tel que le projet de loi la redéfinit implique un arbitrage en défaveur d’autres pathologies graves de patients. Ainsi en 2011, le Parlement a préféré soumettre au ticket modérateur la prise en charge de l’hypertension artérielle sévère plutôt que l’AMP, alors même que l’économie induite pour l’assurance maladie était inférieure de plus de la moitié.Comment ne pas alerter sur l’iniquité que constitue la prise en charge de l’AMP à 100 % alors même que l’efficience de l’AMP est dans bien des cas très faible?
Aujourd’hui, le gouvernement n’a pu débloquer que 750 millions d’euros sur trois ans pour les services d’urgence, et nombre de secteurs souffrent d’un manque cruel de moyens: comment ne pas nous étonner de l’arbitrage fait en faveur de personnes ne souffrant pas d’une pathologie (l’absence de stérilité), et comment ne pas alerter sur l’iniquité que constitue la prise en charge de l’AMP à 100 %, sans ticket modérateur, alors même que l’efficience de l’AMP est dans bien des cas très faible?
C’est pourquoi nous, associations de malades, demandons à Madame Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, de remédier à cette situation source d’inégalité envers les malades. D’abord en réservant les ressources de l’assurance maladie à la prise en charge des maladies, ce qui exclut la prise en charge des actes afférents à la réalisation d’une assistance médicale à la procréation pour des assurés non atteints d’une pathologie altérant leur fertilité́. Ensuite en introduisant le ticket modérateur dans la prise en charge de l’AMP, comme c’est le cas pour la plupart des soins.